LE
COU DE LA HACHE ou comment trancher dans le vif du
sujet.
mais
plutôt celui qui ose la regarder en face à l'image de ce
gangster de la prohibition qui au
lendemain de la nuit de la Saint-Valentin retourna sa
mitraillette contre son visage et vida le chargeur d'un seul coup.
Pas de reflet dans le trou noir du canon, pas de miroir
rétroviseur comme sur la caméra de Peeping Tom qui
tenait à voir ses propres yeux face à la
baïonnette de l'objectif.
-Tout de même cela ne doit pas
être évident, tout au moins pas très pratique et
moins simple que d'avaler une potion fatale.
-Pas plus que de sortir de chez un spécialiste et de se
demander où est le sens de la vie de 5 à 7; pas plus
que de se tenir à la date qu'on a inscrite soi-même sur
le miroir de la cheminée de la chambre; pas plus que d'avancer
un pas de plus au-dessus de la corniche en zinc; pas plus que de
braquer furieusement à droite quand on est coincé sur
l'autoroute entre deux trente tonnes. Le tout c'est d'avoir la foi;
comme pour la vie, c'est toujours une histoire de conviction profonde
entre notre âme et notre conscience. Avaler l'ostie avec la foi
du criminel comme Hyde-Opale avale le philtre du dédoublement
de la personnalité
.
Que veut-on être (et non pas qui) et en a-t-on toutes les
données pour un voyage sans destination, aux dires du
Capitaine.
- Lequel, celui qui emportait toute la mémoire du monde dans
son sous-marin et vidait l'air de ses ballasts pour descendre dans le
noir? Celui qui s'arrêta pour mourir dans une île
mystérieuse?
- Celui-là même, qui fit de sa retraite de
Révolté un luxe de véritable calme.
- Capitaine Ne Hemo qui voulait fuir la surface décevante du
monde en se laissant couler sous l'océan pour y vivre
autrement des ressources maternelles.
- I remember, qu'un jour de mon enfance j'ai vu le manche d'une hache
dégouttant du sang d'un canard que mon grand-père
venait de décapiter sur le billaud. Malheureusement la
lame carminée avait giclé à deux mètres
et je ne savais même plus par quoi j'étais le plus
épouvanté. Cela n'a empêché personne de
savourer la bête.
- Oui, c'est exactement la même chose: j'aimerais écrire
à coups de serpe comme on se dégage un chemin, saper la
création à la base, tomber en vrille au fond des
abysses. - A condition de pouvoir remonter
lentement à la surface comme la blanche ophélie en
forme de nénuphar.
- Certes, sinon, à quoi bon perdre autant d'énergie.
Pour ne pas verser dans la folie par manque de lumière et
d'oxygène il faudra remonter lentement par palier comme un
paralytique miraculé réapprend à marcher.
- On dirait une histoire de plongeur qui se prend pour un poisson des
grands fonds.
- Rien à voir: il faut rester homme et simplement homme
jusqu'à la limite. Il ne s'agit pas de subir une ultime
métamorphose mais d'être un humain à plein temps.
Apprendre à utiliser les 9/10eme du grand cerveau au lieu de
partir triste de ne pas avoir vu toutes les étoiles.
- Je me souviens d'une nuit, en voiture, où après avoir
été ébloui par des phares à ma rencontre,
j'ai cru voir des merveilles: ce n'était que des moustiques
écrasés et des gouttes d'eau sur mon pare-brise.
- On n'assassine personne avec une lame rouillée.
- J'en connais qui s'endorment tous les soirs comme on coupe une
tête ... enfin, jusqu'à un certain âge où
le petit comprimé devient indispensable.
- Même Némo finit par faire un voyage immobile.
- Rien ne m'a jamais plus impressionné qu'un sous-marin
figé dans sa base de béton, émergeant à
moitié des eaux noires du quai. Les souvenirs de guerre
eschatologiques qu'on me racontait alors y étaient pour
quelque chose mais je crois que c'est la profondeur infinie de le mer
qui me tourmentait le plus. La terre avait un centre en feu donc
lumineux mais la mer était ténébreuse et sans
espace.
- C'est pour cette raison que vous devriez vous décider
à plonger mais ce ne sera pas un saut à
l'élastique, on ne remonte pas instantanément comme si
on se prenait pour un yoyo, c'est un aller simple. Le retour n'est
pas un retour. On ne recommence pas, on ne corrige pas. On fait SANS
et AUTREMENT. Comme disent les gens: "il faut creuser la question"
tout en sachant qu'il n' y a pas de fond et j'en connais
beaucoup qui se fatiguent avant la trouvaille toujours
espérée. Je vous parle d'un tunnel sans lumière
au bout et vous constaterez que ce n'est pas un oxymore pour le
plaisir. "La vida no esta una flora" disent les Espagnols: il n'y a
aucun épanouissement mais seulement une vague floraison pour
une consomption funeste.
- Il s'agirait juste de faire un procès-verbal: constater l'
Etat des lieux de la demeure où il y a péril et pondre
un rapport digne d'intérêt.
- Oui, un U-blog, un carnet de bord à la Cristobal Colon,
un
récit de voyage à l'envers avec en tête, sans
cesser, la même idée: comment va-t-on faire pour en
revenir, de cette terre inconnue?